→ LE PATIENT ANGLAIS - ANTHONY MINGHELLA

"I once traveled with a guide who was taking me to Faya. He didn't speak for nine hours. At the end of it he pointed at the horizon and said, "Faya!" That was a good day."

Cette fois ci, je me jette à l’eau. Si je parle de me jeter à l’eau, c’est qu’il m’est toujours très difficile d’écrire un commentaire sur une chose que j’adore. J’ai toujours peur de ne pas transmettre tout l’enthousiasme et le plaisir que j’éprouve.

Mais si ces films qu’on oublie vite, comme Adèle Blanc Sec, ont droit à leur commentaire, alors je me dois d’écrire un billet sur Le Patient Anglais. C’est peut être mon film préféré. En tout cas, c’est vraisemblablement celui que j’emporterais sur une île déserte. Ne serait-ce que parce que je l’ai revu avant-hier pour la quatrième fois, et toujours avec le même plaisir. Alors, il faut vous le dire : il n’est tout simplement pas concevable de ne pas avoir vu Le Patient Anglais.

Avant de donner mon avis, un aperçu de l’histoire. Le Patient Anglais, c’est l’adaptation du roman canadien, l’Homme Flambé, de Michael Ondaatje. Le film raconte les destins croisés d’une jeune infirmière militaire canadienne Hana, et de son mystérieux « patient anglais », ancien pilote dont l’avion s’est écrasé dans le Sahara au début de la deuxième guerre mondiale, et qui a perdu la mémoire.

Meurtrie par la guerre, Hana décide de quitter son régiment pour s’installer, auprès de son patient, dans une vieille bâtisse de Toscane. Et tandis que la jeune femme retrouve peu à peu la joie de vivre, le patient anglais se replonge douloureusement dans ses souvenirs. Il était le comte László Almásy, aviateur hongrois en charge d’expéditions archéologiques dans le désert de Lybie. Son histoire commence lors de sa rencontre avec Katharine Clifton, épouse d’un des membres de son équipe.

"So why follow me? Escort me, by all means, but following me is predatory, isn't it?"

Très difficile de résumer un film pareil ! On évolue sans cesse entre l’époque présente, celle d’Hana qui soigne son patient en Toscane alors que la fin de la guerre approche, et l’époque passée, les années 30-40, la terrible histoire d’Almásy et de Katharine en Lybie. Et chacune des deux histoires est poignante. D’une part l’innocence, la spontanéité et la simplicité d’Hana (formidable Juliette Binoche), et d’autre part, la dureté, la profondeur, et la passion d’Almásy. D’un côté, la douceur de la Toscane, de l’autre, la splendeur du désert.

Je tiens à dire que si Le Patient Anglais a gagné 9 oscars (dont ceux de meilleur film et meilleur réalisateur), il est bien loin d’être un blockbuster américain. Ce film est une pure merveille. Et tout y est génial. Génial parce qu’on est absorbé par lui du début à la fin. Certes, ceux qui cherchent à y trouver de l’action seront déçus. Mais rarement je n’ai pu voir de film qui soit aussi prenant, aussi émouvant par moments, si déchirant à la fin.

"I know you'll come carry me out to the Palace of Winds. That's what I've wanted: to walk in such a place with you. With friends, on an earth without maps. The lamp has gone out and I'm writing in the darkness."

Les acteurs sont extraordinaires, et il faut vraiment le préciser parce qu’ils sont tous géniaux. Kristin Scott Thomas a une très belle voix, et donne énormément de charme et d’élégance à Katharine (sans pour autant avoir la sophistication ou la froideur d’actrices comme Nicole Kidman). Ralph Fiennes est … hum … comment dire ? J’aurais bien envie de dire : bien, c’est Ralph Fiennes quoi ! Bref, c’est le patient anglais, et quelle présence !

Et puis Juliette Binoche, bien-sûr, qui a eu l’oscar du meilleur second rôle pour son interprétation du personnage d’Hana. En passant, une petite pensée pour Colin Firth, qui joue parfaitement le rôle de Mr Clifton, avec beaucoup de simplicité.

Le Patient Anglais est un film d’une rare richesse. Sur le plan esthétique, il est superbe. Tout y est travaillé, mais dans la sobriété, les couleurs sont magnifiques, et la BO est à son image. Le film a eu l’oscar de la meilleure musique, et ce n'est que justice. En écoutant la bande originale, composée par Gabriel Yared, on devine le film, l’histoire, les personnages, l’ambiance, les décors … En un mot, la musique est fabuleuse ! Et puis, un petit coup de cœur pour les morceaux de jazz, notamment le génial Cheek to cheek chanté par Fred Astaire.

Alors de quoi parle Le Patient Anglais ? Est-ce une histoire d’amour ? Est-ce une merveilleuse histoire sur la richesse de notre existence et de nos expériences ? Est-ce une leçon de liberté, un encouragement à vivre, à aimer ? Est-ce une incitation à repenser les « frontières », celles de l’homme et celles de nos pays ? J’ai la conviction que le Patient Anglais, c’est un peu tout ça, mais aussi un peu ce qu’on veut. Et tout ceci en fait un film inoubliable, et beau.